mercredi, avril 04, 2007

Religieux(se) et sa famille

(Article par Billy - Photo: Bananiers Kenya)
Je voudrais vous proposer un échange sur la relation entre le(la) religieux(se) et sa famille. Une personne qui quitte sa famille biologique pour s’engager dans une famille religieuse par les vœux de religion, comment doit-elle vivre désormais sa relation avec ceux et celles qu’elle a quittés?

Il me semble que c’est un domaine où chacun trouve un peu sa manière de faire, son style. Cela n’est pas sans provoquer des incompréhensions, tensions et malentendus de part et d’autre. Pour certains, c’est une croix, un calvaire et pour d’autres c’est une bénédiction. N’ayant pas toujours d’instructions claires et de manières de faire uniformes, cela joue quelque part sur l’identité religieuse de la personne (d’un côté il y a son appartenance à une famille religieuse et de l’autre, il y a sa famille biologique), surtout en Afrique. C’est pourquoi je voulais qu’on partage un peu sur le sujet. C’est aussi un défi pour l’inculturation de la vie religieuse en Afrique compte tenu de notre contexte socio-économique. Le concret de ces relations pose des questions: dans les maladies, la mort, les mariages,…

Que l’on soit religieux ou pas, on est concerné de près ou de loin par la question parce qu’on a un ami, un membre de famille, une connaissance pour qui ce n’est toujours pas facile d’allier les deux aspects.

Finalement, la question qui pourrait lancer les échanges serait celle-ci: comment le(la) religieux(se) doit-il(elle) vivre sa relation à sa famille pour qu’elle ne soit pas une source de tension, de confusion et qu’elle aide le(la) religieux(se) à s’épanouir dans sa vocation?

En ce qui me concerne, ma perception est que le contexte socio-économique joue beaucoup dans la manière de comprendre la vocation religieuse d’une personne. Et donc, dès le départ, il ne faut pas qu’il y ait ambiguïté sur les intentions. C’est en grande partie au religieux qu’il incombe de bien expliquer sa vocation et ses implications surtout ce que cela suppose dans les relations. De mon expérience, cela se passe plutôt bien et ma famille est une source d’encouragement dans ma vocation à aller de l’avant. Merci d’avance pour vos réactions. = (Billy) =

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Je suis contente de constater le retour de ce thème sur ce blog. La relation à la famille mérite beaucoup d'attention. Pour être en paix et plus libre dans mon travail, j'ai préféré aller loin de ma famille. Ce n'est pas parce qu'elle est pauvre que je cherche à prendre distance mais parce qu'en tant que membre, je suis obligée à prendre part à certaines célébrations (mariage, deuil, fêtes, etc.) Mon absence est toujours mal comprise par ceux qui m'ont donné naissance et offerte à l'église pour son service. J'essaie souvent de faire comprendre cette dimension culturelle à ma famille religieuse mais les réponses que je reçois souvent rappellent les exigences de ma consécration. Loin de semer la paix, ce genre de réponse met mal à l'aise et diminue l'efficacité de mon action en communauté. La vie religieuse consiste-t-elle à couper complètement avec nos familles? En outre, quand je vais chez moi, la famille est contente de me recevoir mais quand quelqu'un de ma famille me rend visite au couvent, la communauté n'en est pas contente! Il m'est parfois difficile de trouver la place de la charité dont on parle tant. Est-ce vraiment cela la vie religieuse? Il me semble que l'accent est souvent mis sur des futilités plutôt que sur l'essentiel. Billy me dira certainement que le style de vie dépend de la congrégation d'appartenance. Mais l'essentiel est quand même commun, n'est-ce pas? Et pourquoi la divergence dans la relation à la famille?

Unknown a dit…

Merci Anna pour ta réaction. Je suis tout à fait d'accord avec toi quand tu dis qu'à voir certains comportements dans nos communautés, on peut se demander où est la charité dont on vante tant les mérites. Aussi, peu importe le style de vie, le problème persiste.
Il me semble que le travail à faire est des deux côtés: pour la famille, il s'agit de faire toute une catéchèse en leur explicant, par exemple, que la manière d'être présent en famille va totalement changer et que cela impliquera la participation matérielle et la présence physique. Côté communauté, les supérieurs doivent bien comprendre que la vie religieuse en Afrique est une rencontre de deux culures: celle dans laquelle la vie religieuse est née et celle de l'Afrique. Ce n'est pas possible d'ignorer l'une des cultures.
Pour la vie religieuse, de façon particulière, c'est le Christ qui est au centre. En focalisant notre attention sur cet aspect, il y a lieu de trouver un modus procedendi qui tienne compte des deux cultures. D'autant plus que la vocation à la vie religieuse finalement ne dépend pas d'une culture. Elle a sa propre valeur.

Anonyme a dit…

Billy, ton sujet mérite d'être commenté car il invite à rentrer au dedans de soi-même pour se dire la vérité en se posant la question: quel type de relation j'entretiens avec ma famille? Je pense que le religieux ou la religieuse doit entretenir une relation saine et vraie avec sa famille. Il ne s'agit pas de rompre avec sa famille à cause du couvent mais d’avoir plutôt une relation équilibrée où on est à la fois libre et heureux dans sa vie.
En acceptant mon départ au couvent, mes parents savaient bien ce à quoi je m'engageais; et avant ma consécration, je leur avais expliqué le sens de mon vœu de pauvreté. Ils savent bien que je ne suis pas en mesure de répondre à tous leurs besoins. Car je dépends des autres (la communauté et ses exigences) sans pourtant exclure la charité fraternelle. J’avoue que je ne suis pas indifférente à leurs difficultés mais je suis libre. Quand je ne peux rien faire, je les accompagne autrement tout en les confiant à la Divine providence.
Il me semble que nos familles nous exigent les choses en fonction de ce que nous leur présentons comme image de nous-mêmes et de la vie consacrée. Si je me présente comme "une riche, une bienfaitrice ou une banque", elles viendront avec tous leurs problèmes car elles pensent qu'il y a une source intarissable.
Par conséquent, le religieux ou la religieuse doit savoir dire la vérité à sa famille. Au cas où la congrégation offrait un don, par exemple bourse d’études ou soins de santé, la famille devrait savoir que c'est la communauté qui lui vient en aide et non pas leur fils ou leur fille.
Concernant les événements heureux ou malheureux (deuil, mariage, fêtes), ma famille religieuse m'aide selon les directives de la congrégation. Je contribue si cela est vraiment nécessaire. Dieu merci, ma famille ne m'exige rien.
Ma conviction est que la responsabilité d’évangéliser nos familles et nos communautés nous incombe. Prétendre résoudre à tous prix les problèmes de sa propre famille pendant qu’on n’a rien, c’est vouloir plaire aux hommes plutôt qu’à Dieu. Une telle tendance risquerait d’entraîner à la tricherie, au vol, bref à l’infidélité.

Anonyme a dit…

Grand merci Billy pour cet échange combien profond, qui me perce le cœur, et qui par ailleurs est et demeurera toujours actuel.
A mon humble avis, j'ose croire qu'il vaudra mieux soigner le début, c'est-à-dire bien mettre les points sur les "i" comme pour dire que le(la) religieux(se) et la famille doivent savoir ce à quoi il (elle) s'engage. Lorsque le début est fauché, il serait vraiment difficile de réparer la suite. Je considère ce début comme étant la fondation d'une maison, lorsqu'elle est bien faite, il y a espoir d'avoir une maison bien finie avec le temps.
Il est aussi vrai que le (la) religieux(se) est membre d'une famille à part entière. L'appartenance à une famille religieuse par les vœux de religion ne peut en aucun cas arracher le (la) religieux(se) à l'affection de ceux et celles qui ont contribué à la vie tant physique, morale qu’intellectuelle,…
En d'autres termes, par son vœu de pauvreté, le (la) religieux(se) ne possède rien en privé, remet tout à la communauté et c'est à cette dernière que le (la) religieux(se)doit apprendre à exposer ses problèmes tant personnel que familial. Ainsi donc la communauté a aussi un grand rôle à jouer pour aider le (la) religieux(se) à trouver un équilibre entre son vœu de pauvreté et l'aide à porter à sa famille.

Anonyme a dit…

Le (la) religieux(se) est la première responsable pour évangéliser sa famille à temps et à contre temps pour que celle-ci ne la considère pas comme une banque ou une caisse où on peut puiser tout le temps.
La famille doit savoir que ce qu'il offre à Dieu, n'est pas un donna-donna mais un don. Parfois, c'est nous-même qui donnons l'impression que nous sommes capable de faire tout. Il est important qu'ils sachent que tu as fait le vœu de pauvreté et que nous dépendons de la communauté, sinon la pression familiale conduit à la recherche de l'avoir, de même jusqu'à l'infidélité.
Aujourd'hui, lorsque la famille te saisit, elle est source de soutien et d'encouragement dans le vécu des vœux.

Unknown a dit…

Je voudrais juste reprendre deux éléments qui m'ont touché
1. Carola dit quelque part : "Il me semble que nos familles nous exigent les choses en fonction de ce que nous leur présentons comme image de nous-mêmes et de la vie consacrée. Si je me présente comme "une riche, une bienfaitrice ou une banque", elles viendront avec tous leurs problèmes car elles pensent qu'il y a une source intarissable."
2. Germaine souligne aussi un fait important: "j'ose croire qu'il vaudra mieux soigner le début, c'est-à-dire bien mettre les points sur les "i""
En d'autres mots, il s'agit de purifier ses intentions dès le début et avec soi-même et avec la famille. Pour la communauté, il y a aussi un grand travail à faire pour intégrer un accent proprement africain dans ces relations.

ayaas a dit…

Je constate agréablement que l’auteur de cet article et les internautes qui sont intervenus se réfèrent, chacun ou chacune, à son expérience personnelle. Cela prouve qu’il n’existe pas de vie religieuse en soi ou tout court. Il y a vie religieuse pour tel ou tel institut. Dans ce sens, ce qui paraît comme problème aujourd’hui peut dépendre de la manière de faire de chaque famille religieuse.
Merci Billy de ta suggestion, elle m’aide à être réaliste dans le contexte qui est le mien. Je continue à croire que toutes nos familles ne sont pas pauvres. Nombreuses sont celles qui nous soutiennent matériellement. Et parmi celles qui sont réellement dans le besoin, certaines n’acceptent pas que leur fille ou fils s’en préoccupe car elles connaissent bien les exigences de sa vie. Pourtant certaines personnes consacrées se comportent en vrais bienfaiteurs qui pensent résoudre tous les problèmes de leurs familles même quand leur intervention n’est pas nécessaire.
Toutefois, de par leur vocation, les religieux, religieuses sont appelés à la fidélité au témoignage de vie. En ces temps des grandes crises dans la plupart de nos pays, un domaine dans lequel le témoignage des religieux est très attendu est la compassion aux souffrances de notre peuple par des actes concrets. Aurions-nous bien agi en refusant d’exercer la charité tout simplement parce qu’il s’agit des membres de notre famille naturelle? Voilà pourquoi certains religieux sont toujours tristes. Ils ne peuvent pas se réjouir pendant que les leurs ne sont pas en paix, n’ont pas mangé depuis trois jours ou souffrent à la maison sans soins médicaux.
Je continue à croire également que, tant que nos sociétés africaines ne favoriseront pas le développement réel des peuples, beaucoup de religieux, religieuses ne vivront jamais sereinement leur consécration, voire leur mission prophétique. Le «début» dont parle Germaine dépend non seulement du dialogue entre la religieuse, le religieux et sa famille mais aussi de l’environnement socioéconomique. Mes parents peuvent avoir très bien compris le sens de ma vocation dès le début de mon engagement mais le chômage survenu plus tard les empêche de s’épanouir.
Chose évidente, dans ce contexte, l'entrée dans la vie religieuse peut être l'occasion de conflit entre les exigences de la vie religieuse et la position sociale du candidat ou de la candidate dans la vie. Que faire pour avoir des personnes consacrées plus heureuses?

Anonyme a dit…

Comment le religieux doit-il vivre sa vocation sans couper la relatin avec sa famille ? est une question cruciale à laquelle nous ne pouvons nullement occulté. je pense tout doit etre bien defini au depart quand on prend la decision de servier Dieu en s'iscrivant dans une famille religieuse. L'interesse et sa famille doivent ensemble comprendre la double appartenance. Il est d'abord mis à part et le reste apres. Jesus n'a-t-il pas dit: Celui qui veux me suivre doit renconcer à lui même et ....