samedi, décembre 02, 2006

Respect de la personne humaine

Voici une histoire récente qui frise l'enfantillage d'une communauté religieuse internationale. Ayant pris rendez-vous, je me suis rendu à sa communauté pour lui remettre un courrier en main propre. La religieuse m'a reçu dans un parloir, le temps juste de vérifier le contenu de l'enveloppe que j'avais sous la main. Faisant irruption peu après, une autre religieuse (non-africaine) n'a eu que le temps d'adresser ces mots au visiteur: "Papa, où habitez-vous? Rentrez chez vous"! Ce serait trop lui demander de saluer d'abord et de baisser le ton.

Loin de me surprendre, cette attitude dont j'ignore la motivation a plutôt confirmé mes convictions, ce que je pense du vécu de la consécration religieuse en Afrique. La frustration de celle qui m'avait reçu m'a fait comprendre combien il est urgent de répondre au défi de l'éducation aux vertus humaines (psychologiques et morales), en l'occurrence le respect. Je ne peux pas prétendre être chrétien et religieux authentique si je ne suis pas un homme complet.

Les Africains “n'ont pas be­soin de parler de la commu­nauté, ils la vivent intensément”, dit Jean Vanier dans La communauté, lieu du pardon et de la fête. Mais la communauté naturelle est différente de la communauté chrétienne religieuse, lieu où les membres vivent une profonde intersubjectivité par vocation, lieu caractérisé par l'être-ensemble au nom de Jésus Christ.

Une des merveilles apportées par l'évolution du Concile Vatican II, c'est la découverte de la personne au sein de la communauté. On est passé d'une communauté d'observances à une commu­nauté de communion caractérisée par l'authenticité des rapports hu­mains et par le partage de foi. Un peu partout l'accent est mis sur l'importance de la personne, le respect de ses aptitudes et de son cheminement intérieur, l'importance de la responsabilité personnelle (voir de COUESNONGLE V. dans "Communauté de vie". En effet, "chaque personne en tant que créature image de Dieu, vaut plus que tout l'univers et est digne d'estime et de respect même si ses idées sont fausses, même si son comportement est répréhensible". Le respect nous aide à ne pas sous-estimer les autres et les faire souffrir, à les estimer et à leur montrer cette estime digne de la personne humaine, à les aider à réaliser pleinement leur personne.

La personne consacrée dans sa communauté a besoin non seulement de ce type de respect mais aussi de la confiance. Entendons par confiance "le sentiment de sécurité de celui qui se fie à quelqu'un, à quelque chose... sans crainte d'être trompé, sans hésiter, en toute sûreté". C'est la vertu qui nous pousse à nous confier aux autres, à leur bonté, à leur possibilité de récupération. Rien de plus écoeurant que la méfiance, le manque de respect envers la personne humaine.

Malheureusement dans ce monde d'aujourd'hui, certaines personnes se comportent encore en "gros propriétaire de congrégation" en considérant les autres membres comme des locataires perpétuels. On se trompe gravement en pensant cultiver l'obéissance ou la discipline par l'imposition de ses propres vues. Seule la foi manifestée en confiance permet que l'obéissance soit authentique, loin du formalisme. Que faire davantage pour aider ceux et celles qui exercent l'autorité à comprendre leur rôle?

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Peut-être te rappelleras-tu celle qui, pendant une retraite annuelle au nord Cameroun, fondait en larmes. Je ne parvenais pas à supporter certains de tes exemples concrets à propos du prophétisme de la vie religieuse en Afrique. Je trouvais parfois que tu exagérais. C'est plus tard seulement que je t'ai donné raison. Certains de nos comportements laissent vraiment à désirer, je dirais même que c'est inhumain. A une autre occasion tout en riant aux éclats, je t'avais demandé à quand la prochaine retraite? Il vaut la peine de se remettre en question, de temps en temps. Le leadership s'apprend...
Si l'histoire que tu racontes ici est vraie, je dirais qu'il s'agit d'un grave problème de manière et de savoir vivre en société plutôt que d'un choc culturel ou de mentalité. Car, si j'ai bien compris une nouvelle de ton site, tu venais d'être accueilli dans un couvent des soeurs à Barcelone. Ce qui ne se ferait peut-être pas dans un autre contexte. Cependant je partage l'idée d'éduquer aux vertus humaines, en commençant par les leaders de nos communautés. Je promets revenir souvent sur ta page pour lire d'autres commentaires. Merci, si cela pouvait aider à agir mieux.

Anonyme a dit…

A ces personnes si peu respectueuses nous pourrions signifier, rappeler :
"tout homme est une histoire sacrée, l'homme est à l'image de Dieu ;
et toutes ses oeuvres sont belles".

Anonyme a dit…

Ceci est un vrai problème et il est sérieux. C'est cela qui empêche l'épanouissement individuel et entraîne malheureusement à l'hypocrisie. Il y a pire que ça. Pas la peine d'étaler d'autres faits. J'ai seulement honte d'appartenir à cette partie du monde qui agit autrement malgré nos nombreux efforts d'amélioration. Mais l'attitude d'une seule personne ne devrait pas généraliser l'image. Des communautés heureuses existent aussi en Afrique malgré les hauts et les bas du quotidien. Courage!

Anonyme a dit…

Quand j'ai raconté cette histoire à ma communauté hier soir, on m'a demandé de te faire cette suggestion. Si c'est possible, rentrer où cela est arrivé et parler de ton malaise avec la personne concernée. C'est une façon de l'aider à prendre conscience de son comportement. Si tu l'acceptes, tu pourras nous dire la suite par la même voie. Ok?

Anonyme a dit…

bos tu me fais rire avec cette histoire que je découvre en retard; ça arrive, n'est-ce pas? La prochaine fois que tu visiteras mon pays, h'hésite pas à faire un petit tour chez nous même sans rendez-vous. Tu auras peut-être une autre image de ce monde dont tu parles. D'accord?

Anonyme a dit…

Quelle leçon as-tu de cette belle expérience? Moi à ta place prochainement, s'il y a un courrier pour la même personne, je l'appelle chez moi; si elle ne veut pas venir, je le retourne à l'expéditeur. Je l'ai déjà fait, quand on ne reconnaît pas ma bonne volonté ou mon esprit de charité. J'aimerais savoir si tu as encore rencontré la responsable comme le suggérait un commentaire. Merci

Anonyme a dit…

Quant à moi je m'interroge sur le mobile qui a poussé la soeur superieure a -t-elle réagit de la sorte ?
Jc

Anonyme a dit…

Malheureusement ce genre d’attitude arrive souvent surtout là où la confiance mutuelle n’existe pas et où règne le néocolonialisme. Même si la personne était fautive, le bon sens agirait autrement. Pour moi peu importe le mobile qui, d’ailleurs, n’est connu que par la personne concernée, le respect est fruit d’une bonne éducation. C’est facile de continuer à voir l’homme ou la femme comme objet de péché mais cela ne tient plus debout à l’âge où l’homosexualité, le lesbianisme n’est plus une réalité cachée.